irak
À 46 ans, Johnny vit dans une modeste demeure du petit village de Sherafiya, dans le Kurdistan irakien.
À l’intérieur, aucun meuble. Dans ce qui semble être le salon, deux canapés et trois valises s’entassent.
Il est originaire de Bagdad. Pendant des années, il était transporteur d’alcool. Un travail risqué et difficile, mais qui lui permettait de faire vivre sa famille et de payer le loyer de leur petit appartement.
Puis un jour, tout s’est arrêté. Une loi a interdit la vente d’alcool en Irak. Les entrepôts ont fermé, les camions sont restés à l’arrêt et Johnny s’est retrouvé sans travail. Depuis, il cherche, en vain. Son âge et ses douleurs aux os ne lui permettent plus d’accepter n’importe quel emploi. Son souhait, désormais, est de rebâtir une vie, à Sherafiya. Trouver un travail, remettre la maison en état et, surtout, préparer l’arrivée de sa mère et de sa sœur. Mais la tâche s’annonce immense. La maison, restée inhabitée depuis deux ans, doit être entièrement retapée. Il faut rétablir l’eau courante, installer l’électricité, trouver un générateur et colmater une large fissure dans la cuisine. Des travaux lourds pour un homme seul, mais qu’il entreprend avec courage.
Johnny espère ainsi retrouver un peu de stabilité, et surtout, un foyer où sa famille pourra à nouveau vivre en paix.
arménie
À Ararat, tout près de la frontière azrbaïdjanaise, une famille vit dans des conditions difficiles, dans une vieille maison qui ne protège ni du froid, ni de l’humidité. Le sol est en terre, l’air un peu frais, et on devine l’usure des années. Autour, des animaux errent : des chiens, des cochons, quelques poules. Ils font partie du paysage, mais personne n’a vraiment le temps de s’en occuper.
On s’y lave rarement, seulement lorsqu’on parvient à faire chauffer de l’eau : parfois une fois dans le mois, selon les saisons. La mère travaille comme femme de ménage dans l’école du village, le père travaille à Erevan, mais leur absence et surtout leurs soucis font que la tenue de la maison repose presque entièrement sur les épaules des enfants. Ils sont six, deux garçons et quatre filles, et ce sont les deux aînés qui veillent sur les plus jeunes parfois aidés par la grand-mère. Personne ne les accompagne à l’école, leur vie s’organise au jour le jour, dans un mélange de solidarité instinctive, d’épuisement silencieux et d’inventivité enfantine.
Notre équipe en mission leur a déjà apporté du bois pour l’hiver, de la nourriture pour tenir les semaines difficiles, des vêtements, un peu de matériel, parfois même des animaux pour leur permettre de gagner en autonomie.
Le véritable défi est d’aider ces enfants à grandir autrement que dans l’abandon silencieux. Il s’agit de leur offrir un lieu où apprendre, jouer, se structurer. C’est pour cela qu’un projet plus large est en préparation : un accompagnement qui ne soit pas ponctuel mais régulier, patient, inscrit dans la durée.
liban
Depuis le décès de sa mère il y a six mois, Denise vit seule dans un petit appartement de Beyrouth. Atteinte d’une maladie dégénérative, elle perd progressivement la vue à tel point que, depuis deux ans, elle ne distingue même plus la lumière de son salon. Et depuis la mort de sa mère, il y a six mois, elle vit seule, sans repère, sans appétit, comme si la vie avait perdu tout goût. À chacune des visites de nos volontaires, qui lui apportent un plat chaud, préparé pour elle, pour l’aider à se nourrir un peu, pour lui redonner de la force, Denise raconte ses histoires d’amour dont celle avec un certain Joseph, son grand amour d’autrefois, ou ses souvenirs d’enfance, quand elle jouait avec ses frères et sœurs.
Sur les murs de son salon, on peut admirer ses anciennes broderies en point de croix. De beaux tableaux aux couleurs vives, d’une finesse de précision. Aujourd’hui, elle ne peut plus broder, ni sortir de chez elle. Une de ses seules amies, sa voisine Rita, est décédée récemment.
Alors nous faisons ce que nous pouvons. Nous lui apportons de la nourriture, nous participons à l’achat de ses médicaments, pour qu’elle garde un peu de force, pour qu’elle sache qu’elle n’est pas oubliée.
syrie
Célibataire, sans emploi, Samira vit à Alep avec sa sœur. Sa vie a basculé le jour où elle s'est écroulée au sol des suites d'un vertige. À l’hôpital, le verdict est tombé : un AVC hémisphérique. Depuis, sa main ne répond plus. Son bras, sa jambe, sa bouche ne bougent plus comme avant. Elle ne sort presque plus. Autrefois, elle allait à l’église, voyait ses amis, marchait dans le quartier. Aujourd’hui, ce sont les voisins et quelques proches qui franchissent sa porte.
Malgré tout, Samira garde la foi. Parfois, la colère la traverse : « Tout ce qui se passe, c’est la colère de Dieu », dit-elle. Mais aussitôt, elle se reprend :
« Nous ne pouvons pas vivre sans Dieu. C’est Lui qui protège nos enfants. » Elle rêve d’un monde en paix, d’une santé retrouvée, d’une Syrie apaisée.
Elle se souvient des jours heureux, de cette enfance où régnaient la charité et le respect. « Aujourd’hui, la cruauté du monde fait oublier ces beaux jours ».
égypte
Depuis deux ans, Fostena souffre d’une thrombose veineuse profonde. Par peur que le caillot ne se déplace jusqu’à son cœur ou son cerveau, elle vit alitée, contrainte à l’immobilité. Ce repos forcé contraste douloureusement avec la vie active qu’elle menait autrefois. Elle aimait passer ses journées à la paroisse ou à l’église, entourée de ses amies, à échanger et à rire. Aujourd’hui, elle vit cloîtrée entre quatre murs, dans une maison insalubre d’un quartier pauvre d’Alexandrie, avec sa fille, son beau-frère et ses trois petits-enfants. Le plus difficile pour elle est de payer ses traitements. Les médicaments coûtent cher, bien au-delà de ce que la famille peut se permettre. Pour l’instant, elle survit grâce aux économies laissées par sa mère défunte, mais ces ressources s’épuisent peu à peu.
Chaque consultation à l’hôpital lui coûte 28 euros, une somme colossale pour ce foyer déjà fragilisé. Ses journées sont longues et silencieuses. Pourtant, Fostena ne perd pas sa joie de vivre. Malgré la maladie et la fatigue, elle garde ce tempérament pétillant qui la caractérise. Avec un sourire malicieux, elle confie souvent : « Quand mon mari est mort, je me suis dit que j’allais enfin pouvoir faire ce que je veux… mais maintenant je suis malade, quelle ironie du sort ! »
Régulièrement, l’équipe de SOS Chrétiens d’Orient en Égypte lui rend visite et lui remet un colis alimentaire, de quoi nourrir toute la famille pendant un mois.
pakistan
Un homme rachitique, à la peau tannée par le soleil, bêche une terre boueuse. Dans cette briqueterie, ils sont une vingtaine de chrétiens, tous esclaves économiques. Ils sont au service de propriétaires peu scrupuleux qui les exploitent contre un salaire de misère et un abri sommaire. Tous les jours, ils travaillent sans relâche, même s’ils sont malades, pour payer leurs propriétaires. La dette est telle que certains paysans se retrouvent enchaînés à leur employeur à vie. Le seul moyen de sortir de cette spirale infernale est de racheter leur liberté et de les reloger dans des colonies protégées.
Dans l’un des villages catholiques du diocèse de Faisalabad, SOS Chrétiens d’Orient participe à la construction de vingt maisons destinées à accueillir de nouvelles familles chrétiennes libérées.
éthiopie
Tesfaye n’a pas d’âge. Pas tant parce qu’il ne connaît pas sa date de naissance, que parce qu’il est un intouchable. Avec sa famille, Tesfaye vit dans une très modeste demeure. L’électricité est leur seul luxe, par intermittence. Sa femme et ses enfants n’ont pas la lèpre, pourtant eux aussi subissent la ségrégation de fait : les lépreux font peur, et ceux qui vivent avec eux aussi.
Au marché, dans les commerces, au café, à l’église même… les lépreux sont des indésirables qui portent avec eux le fardeau de la maladie, celle de la honte et du rejet, qui ronge les chairs et exclut de la société.
Pourtant, Tesfaye et sa famille restent dignes. Hors de question de mendier, de se plaindre, de commettre des larcins ou de partir de chez eux. C’est leur terre, et leur destin. Ils l’acceptent avec un mélange de fatalisme et d’honneur. L’honneur issu d’une conscience de choix justes et d’une attitude courageuse face à l’adversité.
Pour Tesfaye et 87 autres familles lépreuses de Kombolcha, terre déchirée en ce moment par la guerre civile, SOS Chrétiens d’Orient prévoit de construire un moulin qui leur permettra de subvenir à leurs besoins.